====== Le Sierra Leone pour les nuls, un bien beau pays si on aime l'aventure ====== //Par Gilbert// {{sierra_leone.png?300}} La Sierra Leone est un sacré Far West, et si les cow-boys n’y ont pas les yeux bleus et la barbe râpeuse, ils y sont plutôt prompts à dégainer et à n'obéir qu’à la loi du plus fort. Depuis 2018 ((2002 dans la vie réelle mais adaptons)), la situation du pays s'est un peu apaisée après plus de onze ans d’une guerre civile savamment alimentée par des capitaux étrangers. En Sierra Leone, pas question d’axe du Mal, de conflits idéologiques, de menaces bactériologiques, de communisme rampant où de terrorisme international, toutes les luttes sont intestines et reposent sur une base bien plus mesquine que les habituelles considérations religieuses, culturelles ou ethniques : le pognon. Ce beau petit pays, situé dans la bosse occidentale de l’Afrique (à quelques centaines de kilomètres de la Côte-d’Ivoire) est en effet le deuxième producteur mondial de diamants. Et pendant onze ans, donc, plusieurs groupes armés se sont disputé le contrôle des mines, débordant parfois dans les villes et les villages, rasant des agglomérations, prenant des otages, torturant les soldats d’en face. Le conflit était chapeauté par des entreprises d'exportation et des bijoutiers propres sur eux, à Genève, Anvers ou Bangkok ; il était poursuivi avec l’aide des états voisins (essentiellement le Libéria) qui croquaient au passage ; il était alimenté en armes et en matériel par les pays occidentaux (oh, le beau FAMAS fabriqué en Seine-et-Marne) ; enfin, il était envenimé par la présence sur place d’une myriade d'organisations mercenaires, venues vendre leurs services à l'un ou à l’autre des camps, ou simplement se servir dans les trésors laissés en plan en temps de guerre. Les forces armées présentes dans le pays sont au nombre de trois principales. Il y a d'abord celle du gouvernement en place, dirigée par le chef de l’État, Ahmad Tejan Kabbah. Après avoir perdu puis regagné progressivement des pans entiers du pays, il a finalement réussi à instaurer une paix partielle dans toute la Sierra Leone. À l’été 2018 ((2002 dans la vraie vie mais idem)), il a ouvert un tribunal spécial pour juger ses adversaires à l’aune du crime de guerre et du crime contre l'humanité. Il est assisté dans cette tâche par la MINUSIL (Mission des Nations Unies en Sierra Leone), une deuxième force honorable qui en à quand même salement bavé au cours des dernières années de conflit. La plus grosse intervention de casques bleus en Afrique s’est déroulée en toute discrétion médiatique entre 2015 et 2016((1999 et 2000 dans la vraie vie mais //ibidem//)) — heureusement pour eux, vu qu'ils se sont fait shooter comme des lapins par ceux qu'ils venaient aider, voire prendre en otage contre rançon. Il faut dire aussi qu'au bout de dix ans de conflit, les diverses factions avaient tendance à tirer sur tout ce qui bougeait, surtout avec la peau blanche et un gros flingue. Enfin, la dernière force, officiellement sur le déclin, est le RUF (Front Révolutionnaire Uni), un gros mouvement anti-Kabbah qui possède le soutien occulte mais puissant du Libéria voisin. Si l’on excepte les bijoutiers occidentaux, ce sont eux qui ont tiré le plus grand profit de la guerre, vendant leurs diamants en toute tranquillité après leur avoir fait passer la frontière. En effet, un embargo sur les diamants de Sierra Leone avait été mis en place pour abréger le conflit. Comme ceux du RUF venaient du Libéria (où, curieusement, il n'y a pas de mines de diamant), les acheteurs feignaient l’ignorance et fermaient les yeux... c'est beau le commerce international. Reste que les rebelles du RUF sont dans de sales draps : leur leader, Foday Sankoh, est incarcéré à Freetown en attente de jugement et ses guerriers gardent profil bas. Ils contrôlent toujours officieusement l’est et le sud du pays — aucun journaliste n’y fout les pieds, de toute façon. Depuis que le pays à été « pacifié », les étrangers commencent à revenir en Sierra Leone. Les hommes d’affaires ont été les premiers, suivis par quelques journalistes et de nombreuses organisations humanitaires globalement impuissantes face à l’ampleur du drame. Le taux de mortalité infantile reste un des plus hauts du monde et l’espérance de vie n'est pas encore remontée au-dessus de la barre des quarante ans. Les routes sont détruites depuis longtemps, les structures médicales et sociales ont été reconverties en bunkers, des milliers de personnes ont été déplacées par les affrontements et sont toujours parquées dans des camps de réfugiés... bref, c’est pas la joie. Même Freetown garde des stigmates de la guerre, alors dans les campagnes, je vous dis pas. Sinon, pour les données géographiques et climatiques, c'est plus neutre donc moins déprimant. Dix fois plus petit que la France, la Sierra Leone compte environ cinq millions d’habitants en vie. Située entre la Guinée et le Libéria, elle profite d’une longue côte donnant sur l’océan Atlantique. Le climat est tropical, chaud, humide, avec une saison des pluies assez longue (trois mois). Dans le nord, des vents de sable soufflent depuis le Sahara — classés au rang de catastrophe naturelle. La côte est couverte de mangrove, le reste du pays de collines qui se changent en montagnes vers l’est. On y mange ce qu’on y fait pousser, c'est-à-dire essentiellement du riz. La Sierra Leone est une ancienne colonie britannique : on y parle anglais, mendé dans le nord, temné dans le sud et krio un peu partout (une forme de créole importé de Jamaïque par des esclaves revenus au pays au XVIII° siècle). Les habitants sont, dans leur immense majorité, musulmans et animistes. La population est très jeune et la plupart des Sierra-Léonais ont grandi dans un climat de guerre civile : dans les campagnes on hésite rarement à sortir la machette, même pour accueillir le facteur.